
C’est une histoire d’amitié brisée entre un cavalier et son cheval. Les héros aussi craignent la mort mais quel prix payer pour sa sécurité? Et quel crédit accorder à une prophétie? Fuir son destin est inutile, il finit toujours par vous rattraper.
Né en 1799, Alexandre Sergueïevitch Pouchkine est issu de la noblesse russe. Il commence très tôt à écrire de la poésie et il est déjà bien connu lorsqu’il quitte le lycée impérial où il a fait ses études de 1811 à 1817.
Chef de file d’un cercle de poètes romantiques, un de ses poèmes antireligieux et érotique lui vaut d’être exilé près de la mer Noire en 1820. Il mourra en duel après une vie fort dissipée en janvier 1837.
Le Prince Oleg
Le conte est très court mais il a l’allure d’un poème en prose mi-épique, mi-fantastique. Le cheval participe comme un coéquipier à l’aventure de son maître. Il y a des couples célèbres comme Pégase et Bellérophon, Bucéphale et Alexandre, Zingaro et Bartabas.
Cet animal et l’homme sont proches au point de ne faire qu’un dans l’imaginaire: Le centaure. Les premiers cavaliers ont dû produire cet effet monstrueux sur les populations.

La rencontre avec le prophète Agal n’est pas sans rappeler la rencontre de Macbeth avec les trois sorcières. Sur un chemin, dans un endroit isolé, l’apparition est soudaine. Le prophète a une vie de privations, il se nourrit très frugalement., ce qui semble être une condition favorisant les visions de l‘avenir.
Le tableau est saisissant: le jeune prince et ses riches vêtements s’incline devant le vieillard en haillons. Le savoir est supérieur au pouvoir. Le discours est comme souvent sibyllin « la mort te viendra de ton cheval ».
La réaction du prince Oleg est immédiate, il tend les rênes à son palefrenier et se sépare de son fidèle ami. Il s’assure que le cheval ne manquera de rien mais il ne devra plus jamais l’approcher. Ils ne se reverront plus. Et Oleg repart dans la nuit sur une nouvelle monture, pleurant son compagnon.
La vie du Prince semble le combler: gloire, honneur, descendance, longévité. Il traverse tous les dangers sans être blessé. Cependant, le grand âge venant, il est triste et ne quitte plus son palais. Le bilan de sa vie lui est évoqué de manière négative: tous les chevaux, tous les amis, tous les honneurs n’ont pu remplacer le seul compagnon de sa fougueuse jeunesse.
Oleg souhaite revoir son vieux compagnon. Les vies des deux amis ont été tellement séparées qu’Oleg s’attend presque à retrouver intact le fougueux cheval de ses jeunes années. Ainsi sommes-nous surpris de revoir un ami d’enfance après de longues années.
Mais le cheval est mort depuis longtemps et Oleg souhaite se recueillir sur ses os, pensant que le vieil ermite s’était trompé. Il se désole d’avoir subi cette séparation cruelle et injustifiée. Il tend la main pour caresser une dernière fois le crâne blanchi de l’animal, pour un dernier adieu.
A cet instant, un serpent venimeux se faufile hors du crâne du cheval et le mord. Oleg s’écroule. La mort lui est bien venue de son cheval. Il s’est rendu lui-même à sa rencontre après l’avoir fuie si longtemps.