Le 29 janvier 2019, j’ai assisté à une conférence organisée par l’association chalonnaise ACTE. Philippe, le conférencier, nous a fait part de sa réflexion, de ses recherches et de ses lectures. Voici quelques éléments que j’ai pris en note.
1970: Le Club de Rome, constitué de scientifiques et d’économistes venant d’une centaine de pays différents, lance une grande alerte sur l’effondrement probable de notre société. Un modèle informatique est mis au point, qui s’avérera étonnamment juste et précis dans ses prévisions puisqu’en 2012, les chiffres correspondent à la courbe prévue. On s’aperçoit également que si l’on modifie un ou deux paramètres, cela ne change rien. Il faut agir sur tous les paramètres. Le groupe recommande entre autres d’arrêter la croissance, d’avoir une gestion raisonné des matières premières et de limiter la démographie.
Si on avait suivi ces conseils, on aurait pu envisager un confort et un niveau de vie comparable à celui des années 1970, ce qui serait resté supportable. Maintenant, dans le meilleur des cas, c’est un niveau de confort correspondant au tout début du XIXème siècle qui peut être espéré.
La courbe prévoit un effondrement de la population mondiale entre 2020 et 2030, le nombre d’humains serait divisé par dix ou vingt. Qu’est-ce qui pourrait provoquer une chute aussi rapide ? Les guerres, les épidémies et la famine. On n’a pas pris en compte à l’époque le réchauffement climatique, qui ne peut qu’alourdir la balance.
Il y a eu dans le passé nombre d’autres effondrements de civilisations, certains lents, d’autres plus brutaux. Les exemples les plus célèbres sont les Incas ou les habitants de l’île de Pâques. Cela n’a à chaque fois concerné qu’un nombre limité de personnes, alors qu’aujourd’hui, le problème est mondial.
L’étude de ces effondrements montre que plus le système est complexe, plus l’effondrement est brutal. Un système complexe résiste à la manière d’un chêne, il est solide mais tombe d’un coup, contrairement au système « roseau », correspondant à un système plus simple.
Des indicateurs sont pris en compte:
- La courbe des matières premières disponibles suit une montée, un pic qui peut être un plateau, puis amorce une descente inéluctable. En ce qui concerne le pétrole, le pic a déjà eu lieu, en 2006. Il a été suivi de la crise des subprimes en 2008 et d’émeutes de la faim dans 35 pays.
- Un système politique avec une caste d’élites entraîne toujours un effondrement et si on observe de grandes inégalités dans la répartition des richesses, cet effondrement est brutal.
- Le TRE, taux de retour de l’énergie. Il s’agit de l’énergie investie par rapport à l’énergie produite par cet investissement. En 1950, il était de 1% pour le pétrole, en 2018, il n’était plus que de 1 pour 20, et même 1 pour 8 pour l’éolien.
Le GIEC avait envisagé six scénarios possibles pour l’avenir proche. Personne ne croyait au pire scénario, totalement pessimiste. Il faut se rendre à l’évidence, aujourd’hui, c’est celui que nous avons emprunté. Nous ne nous en rendons pas encore compte parce qu’il y a encore de quoi se nourrir au supermarché mais, à dépense d’énergie égale, un bateau de pêche ne rapporte plus que 6% du tonnage de la période pré-industrielle.
Il est urgent de changer de mode de pensée individuelle, de ne consommer que le nécessaire, et d’observer, soutenir ou participer aux expériences en cours, les écovillages par exemple. On évoque malheureusement aussi l’écofascisme. Economie verte, décroissance…la solution sera plurielle, la diversité multiplie les chances, ce qui doit nous inciter à ne pas porter de jugement sur les recherches ou l’attitude des autres, même si nous ne les comprenons pas. Les groupes « survivalistes » sont extrêmement divers, sur une palette allant de l’extrême-droite à l’extrême gauche. On trouve aussi des transitionneurs, des « aquabonistes » (à quoi bon !), des « çavapétistes » ( ça va péter !) et nous pouvons être tentés tout à tour par chacune de ces attitudes. L’auteur Pablo Servigne étudie ces différentes réactions psychologiques dans des ouvrages comme Une Autre Fin Du Monde Est Possible ou Comment Tout Va S’Effondrer.
Et les points positifs ? Les sociologues ont remarqué que l’abondance favorise l’égoïsme, alors qu’au contraire l’empathie se développe en période de pénurie. D’autre part, le cheminement de l’humanité n’est pas rectiligne, il peut y avoir un sursaut.
Le pire n’est pas certain. En 1992, deux pays se sont effondrés et ont subi un embargo: Cuba et la Corée du nord. Cuba s’est tourné vers la permaculture et se rapproche peu à peu de la démocratie. La Corée du nord a perdu 10% de ses habitants.
Bibliographie:
- Les cinq stades de l’effondrement – Dimitri Orlov
- Face à l’Effondrement, si j’étais maire ? Alexandre Boisson, André-Jacques Holbecq – editions Yves Michel (sosmaires.org)