Des Mayas à Jean de Jérusalem en passant par Nostradamus, petites prophéties individuelles ou annonces des temps à venir pour l’humanité, les prophéties relient les temps anciens et le futur et semblent soulever un coin du voile mystérieux de la vie.
Elles suscitent souvent l’intérêt, avec des sentiments mêlés de crainte ou de moquerie, de déni ou de superstition. Datées ou plus évasives, les prophéties révèlent surtout nos craintes et nos souhaits.
Un peu d’Étymologie
Le terme «apocalypse» est apparu au XIIème siècle, il vient du latin chrétien apocalypsis qui l’a emprunté au grec aποκάλυψις. Le terme grec est une traduction d’un mot hébreu qui signifie «révélation» (mot à mot « enlèvement du voile »). Le sens de «fin du monde» n’est apparu qu’au XXème siècle.
«Prophète» vient également du grec via le latin ecclésiastique. Le préfixe «Pro» signifie « à l’avance » et «phème» « je parle ». Le prophète est donc celui qui parle à l’avance du futur.
Le mot Horoscope n’apparaît qu’au XIV siècle, en suivant la voie habituelle (grec puis latin). Il est formé de horo (heure) et scope (scopein: « qui examine »). On examine l’heure de la naissance.
«Eschatologie» apparu en 1864 est formé directement sur le grec eschatos (dernier) et logos (discours) et signifie discours ayant trait à la fin du monde.
On trouve le mot Chiromancie dès 1327. Il vient du grec Kheir qui signifie main.
L’horoscope
Les moyens utilisés varient selon les lieux et les époques: observation des viscères ou du vol des oiseaux chez les Romains, boule de cristal ou chiromancie, lecture de cartes de tarot laissent cependant la prépondérance à l’étude du ciel.
Certains traits de caractère se retrouveraient selon le signe du zodiaque: ainsi il y aurait une forte proportion de «Lion» parmi les chefs de gouvernement ou les cadres supérieurs. Les natifs de ce signe porteraient une grande attention à leur personne (ils se regarderaient souvent dans les miroirs) et en particulier à leur coiffure (la crinière du lion!).
On dit que les natifs de la «balance» peinent à prendre des décisions, que les «gémeaux» ont horreur de la solitude et développent pour cela des dons d’amuseurs en société, que les personnes du signe du «cancer» sont souvent rêveurs et imaginatifs: ils sont attirés par les métiers liés à l’art et à la littérature.
La prophétie de Jean de Jérusalem
Jean de Jérusalem, appelé aussi Jean de Vezelay, serait l’un des huit fondateurs de l’ordre des templiers. Le texte est annoncé comme étant daté de 1099, à moins qu’il ne s’agisse d’un canular. Il serait alors du milieu du XXème siècle.
On trouve une traduction joliment illustrée sur internet.
La prédiction est étonnante. En voici quelques extraits :
« Mille ans auront passé et Jérusalem ne sera plus la ville des croisés du Christ »
[…] Je vois la terre immense. Des continents qu’Hérodote ne nommait que dans ses rêves se seront ajoutés.»
L’argent est roi : «Qui regardera les étoiles y comptera des deniers»
L’information est planétaire et en temps réel :
«chacun saura ce qui est en tous les lieux de la terre
On verra l’enfant dont les os percent la peau[..]
Mais l’homme qui verra détournera la tête
Car il ne se souciera que de lui»
Comme dans l’évangile de Saint Jean, une société meilleure ou un nouveau monde fait suite à la destruction du monde actuel.
Les conséquences des prédictions sont souvent malheureuses, il aurait souvent mieux valu ne rien savoir. Evidemment, la prophétie s’accomplit toujours lorsqu’il s’agit d’une œuvre de fiction.
Certaines prophéties ont le don de se réaliser d’autant plus facilement qu’on a essayé de les éviter. Il en est ainsi pour la pythie et Œdipe. Oedipe n’a épousé sa mère que parce qu’il ne la connaissait pas. Jocaste aurait pu s’épargner la peine d’abandonner son enfant. Mais les gens heureux n’ont pas d’histoire…
On confond parfois prophétie et sort jeté. Ainsi les Atrides sont-ils maudits parce qu’Atrée a dévoré ses enfants lors d’un repas. Le sort s’applique inéluctablement. On remarque que ce mauvais sort s’applique souvent aux descendants. L’Ancien Testament ne dit-il pas que le sang versé par les parents retombera sur la tête des enfants.
Nostradamus
Les prophéties de Michel de Nostre-Dame dit Nostradamus sont plus de 300. Elle sont écrites sous forme de vers. On peut y faire son marché, c’est-à-dire interpréter ce qu’on veut à partir des vers sibyllins. Ainsi certains voient dans l’expression «on passera à Memphis» une allusion à Barak Obama. Ce dernier n’a rien à voir personnellement avec Memphis sauf que son père est noir et que cette ville est célèbre pour la lutte contre les préjugés raciaux pour être le lieu où Martin Luther King a été assassiné.
On ne peut nier cependant qu’il y ait parfois des rapprochements surprenants comme la mort du roi annoncée dans l’Epître à Henri II. Mais il est possible que cette épître ait été écrite après coup et aurait ainsi été un bon coup médiatique de l’époque.
On se souvient de la sombre prophétie de Jacques de Molay sur le bûcher, à l‘encontre du pape Clément et de Philippe le Bel et de ses descendants. La prophétie des templiers s’est certes réalisée mais à l’époque, être roi ou prince héritier n’était pas sans risques.
L’Apocalypse selon Saint-Jean
Les quatre cavaliers de l’Apocalypse sont une source de création artistique.
On retrouve le cavalier blanc : la mort, dans le roman « le cheval pâle » d’Agatha Christie. Dans le western de 1985 « Pale rider », le personnage principal apparait dans le cadre de la fenêtre monté sur un cheval blanc au moment même où une jeune fille est en train de lire le passage relatif au quatrième cavalier de l’Apocalypse, monté sur son cheval pâle. On attribue ce texte à l’évangéliste depuis le deuxième siècle après Jésus-Christ. La fin du monde est annoncée par sept trompettes successives. Le chiffre sept souvent utilisé sous-tend toute la structure de ce livre saint. Le texte fait évidemment l’objet de nombreuses interprétations différentes.
Macbeth aurait-il commis ses horribles meurtres s’il n’avait rencontré les trois sorcières? Le premier meurtre pour que la prophétie s’accomplisse (les sorcière l’ont appelé « futur roi ») et le deuxième sur la personne de son complice pour que la fin de la prophétie ne s’accomplisse pas (on a promis à ce dernier une descendance de roi).
De manière anecdotique, il arrive que le corps médical se trompe ou qu’une erreur administrative ait de graves conséquences. Ainsi un patient anglais à qui le médecin, sur la foi d’analyses, avait annoncé qu’il n’avait plus que quelques mois à vivre, a-t-il quitté son emploi, vendu sa maison et dépensé tout son argent en voyages dans des palaces. Lorsqu’il s’est aperçu qu’il ne mourait pas, il a revu son médecin et on s’est aperçu que les analyses étaient erronées. Il a porté plainte.
Une nouvelle d’Oscar Wilde: «Le Crime de Lord Arthur Saville» reprend ce thème et le pousse à l’extrême. Le personnage principal est jeune, riche, aimé et heureux. Il envisage des projets magnifiques lorsque la prédiction le fait changer totalement d’humeur et de vie: il rompt ses fiançailles, devient dépressif et finit par commettre le meurtre annoncé …sur la personne du chiromancien qui a détruit sa vie par sa prédiction.
Enfin, il y a des prédictions suivies d’effets heureux : Une bohémienne aurait lu dans les lignes de la main de Joséphine de Beauharnais quand elle n’était qu’une adolescente et aurait déclaré: «Tu seras plus que reine».
Jésus déclare à Pierre: «avant que le coq chante, tu m’auras renié trois fois». Cette prédiction n’empêche pas Pierre de renier le Seigneur mais lui permet de retrouver la foi lorsqu’il entend le coq chanter, un peu comme s’il entendait à nouveau la voix de Jésus.
Il y a aussi des prédictions fort utiles et fondées scientifiquement comme la météorologie. Il s’agit là de prévisions scientifiques. Cependant, il a fallu de longues années pour que la météorologie soit enfin reconnue. On ne la prenait pas au sérieux. A l’inverse maintenant, il arrive que des usagers portent plainte si la prédiction ne s’est pas révélée totalement exacte.
De nombreux chefs de gouvernement rencontrent encore aujourd’hui des voyantes. Par le passé, il est certain que les devins étaient des personnages influents. L’horoscope est aujourd’hui une véritable industrie financière. Même des journaux sérieux lui font une petite place pour plaire à leurs lecteurs. Parfois totalement loufoque, il se pare des oripeaux de la science. Cela dessert les personnes qui travaillent sérieusement.
Les prophéties sont souvent obscures et ne se comprennent qu’après coup. Ce flou est bien pratique. Les détracteurs ont beau jeu de dire alors qu’en attendant suffisamment longtemps, un événement survient que l’on peut rattacher à la prophétie. Il n’en va pas de même des prophéties précisément datées mais celles-ci se sont toujours révélées fausses ensuite (cf les différentes fin du monde annoncées puis heureusement reportées).
On ne se souvient que des prédictions qui se sont étonnamment réalisées, pas des autres. Enfin, on verra dans les lignes ce qu’on veut bien y trouver. C’est-ce qui fait la force de cette entreprise qui au demeurant peut aider moralement des personnes en questionnement
Les Mayas
On a beaucoup parlé de la prophétie des mayas parce qu’elle situerait l’apocalypse en 2012, très précisément le 21 décembre. La précision même de la date porte à sourire. De plus, les traductions approximatives peuvent contribuer à trouver dans ces vieux textes ce qu’on souhaite voir.
Si on peut parfois penser que l’humanité court à sa perte en privilégiant le court terme sur le long terme, principalement dans le domaine écologique, une fin du monde en quelques minutes est peu crédible.
Le 21 décembre 2012 étant passé et les médias ayant besoin d’une nouvelle fin du monde, à défaut de monstre du Loch Ness qui ne fait plus recette, voici qu’on déterre les prophéties de Saint Malachie. Il semble que le pauvre Malachie, avec son nom à coucher dehors, n’ait jamais écrit ces prophéties. Son contemporain et ami Bernard de Clairvaux n’en a jamais parlé dans la biographie qu’il écrivit. Il est vrai que pour plus de sûreté et moins de casse-tête, il est encore plus facile d’écrire des prophéties a posteriori, comme ça on tombe étonnamment juste. Pour l’avenir, il suffit de faire comme les astrologues des magazines, quelques phrases sibyllines s’appliquant à de nombreuses situations font l’affaire. Le peuple veut croire, peu importe que cela soit vraisemblable ou pas. Et comme une pendule arrêtée a raison deux fois par jour, n’importe quelles phrase sera vraie un jour ou l’autre.
Pour terminer, je propose donc un jeu : imaginez vous-même des phrases de ce genre. Je me lance :
En des temps de grande chaleur, un brasier gigantesque s’élèvera et peu après un grand peuple se choisira un nouveau chef.
Une année ou l’autre, sur un continent, on annoncera une canicule et des feux de forêt s’ensuivent malheureusement. Quelques semaines ou mois plus tard, il y aura des élections quelque part sur terre, comme il y en a régulièrement. Évidemment, il faudrait le traduire en latin ou en grec, et dire l’avoir retrouvé dans un étrange grimoire au fond d’un grenier.
Bonne(s) fin(s) du monde à vous tous !
Bibliographie
On trouvera un long article très bien documenté dans le numéro de novembre 2009 de Sciences et Avenir : «la science face aux croyances.»
Les charmants animaux anthropomorphes imaginés par Béatrix Potter n’ont pas pris une ride depuis le XIXème siècle. Ils enchantent toujours petits et grands dans le monde entier et sont devenus une valeur commerciale sûre. Peut-être représentent-ils un refuge contre le bruit et la fureur du monde actuel. Sans doute apprécie-t-on aussi les talents de la dessinatrice animalière.
Helen Beatrix Potter est née le 26 juillet 1866 à Londres où elle a passé son enfance. Elle a vécu ensuite la majeure partie de son existence dans les environs d’Ambleside, dans le Lake District qu’elle affectionne. Elle décède à l’âge de 77 ans le 22 décembre 1943.
On ne peut comprendre Béatrix Potter sans connaître un peu son milieu familial. Son père est juriste. Le milieu est très rigide, politiquement conservateur et très attaché aux traditions.
L’imagination et les qualités artistiques ne sont pas absentes, loin de là, puisque son père s’intéresse beaucoup à la peinture et à la photographie. Photographe amateur lui-même (pour rappel, Nicéphore Niepce inventa la photographie en 1822), il est un assidu des expositions de peinture de la Royal Academy. La jeune Beatrix se passionne pour les préraphaélites.
Pendant ses vacances à la campagne, elle étudie la nature en véritable scientifique, en particulier les champignons. Elle est aidée en cela par son oncle, le chimiste Henry Roscoe. Mais à l’époque, être une femme lui ferme les portes de la communauté scientifique. Elle ne peut même pas assister à une conférence où l’on présente les résultats de ses recherches personnelles sur les lichens.
Imaginons une famille de bourgeoisie aisée de la deuxième moitié du XIXème siècle: parents peu démonstratifs mais offrant voyages, sorties culturelles et jouets à leurs enfants. Le matériel d’aquarelle entre dans cette dernière catégorie. En effet, les parents de Beatrix lui refusent le statut d’adulte pendant très longtemps et ne prennent aucunement au sérieux son «passe-temps».
Si Beatrix parvient à sublimer sa vie en se passionnant pour la peinture, son frère Bertram a moins de chance. Il se réfugie dans l’alcool et n’ose avouer à ses parents son mariage. Il partira chaque année en vacances plusieurs semaines avec ses parents sans sa femme et ses enfants!
Une fois mariée, elle abandonne l’écriture et le dessin pour se consacrer à l’élevage. Ecologiste avant l’heure, elle se bat pour ses convictions et pour la préservation de la région des lacs qu’elle affectionne. Elle élève de nombreux animaux et parmi eux des lapins, les véritables descendants de Pierre Lapin (Peter Rabbit).
L’ennui comme source de créativité
Cela n’est pas sans rappeler la famille Brontë dont les enfants grandirent dans un environnement austère, isolés du reste du monde. Ils imaginèrent un univers où ils vivaient des moments autrement plus exaltants que dans leur quotidien. Si leur frère sombra lui aussi dans l’alcool, les deux sœurs Emily et Charlotte en tirèrent des romans à l’atmosphère originale.
Sa peinture
On retrouve facilement dans la genèse de ses sujets la beauté des paysages naturels du Lake district. Ses personnages reflètent évidemment l’immaturité affective dans laquelle elle se complait. Les couleurs rappellent quelques tableaux de préraphaélites comme celui qu’elle préfère entre tous: «Ophélia» de Millais.
L’histoire de Jemima Puddle duck ou Sophie Canetan
Bien qu’écrivant pour les enfants, elle a le souci du vocabulaire juste même si les mots sont parfois difficiles. Son œuvre a une qualité et une exigence qui évitent mièvrerie et facilité. C’est peut-être là une des raisons de son succès et de sa longévité.
Comme dans tous les contes, le héros, ici la cane Sophie, se trouve confronté à un problème: la fermière ne lui fait pas confiance pour couver ses œufs, Sophie ne restant pas en place très longtemps. Après des essais infructueux pour cacher ses œufs, Sophie décide de quitter la ferme pour trouver un coin tranquille.
La voilà donc partie sur la petite route qui monte au sommet de la colline. Il y a bien sûr un bois et un renard. Elle fait de nouvelles expériences comme celle de voler, on pourrait ajouter «de ses propres ailes» pour rendre le double sens de l’expression de l’adolescent qui quitte le domicile (le nid?) familial.
Le renard a l’allure élégante d’un gentleman. Il lit tranquillement son journal assis sur un tronc d’arbre. Il s’adresse très poliment à Sophie qui bien évidemment ne se méfie pas et lui explique son problème. Il se montre très compréhensif, en particulier lorsqu’elle se plaint des poules qui la regardent de haut.
Il lui propose aussitôt de déposer ses œufs dans sa résidence d’été, curieusement emplie de plumes mais très confortable. Il ajoute qu’il aime vraiment beaucoup les canes en général et ne se lasse pas d’admirer ses œufs.
On imagine la suite: la pauvre cane est si naïve qu’elle se met elle-même à la recherche d’herbes aromatiques pour une omelette. Ces mêmes herbes servent généralement à assaisonner la cane rôtie…
Fort heureusement, s’il n’y a pas de fée, il y a un chien de garde qui a deux jeunes amis canins dans le voisinage. Ils sauveront Sophie in extremis et la ramèneront en pleurs au village.
Autres personnages de Beatrix Potter
Beatrix Potter observe les personnes qui l’entourent mais aussi les animaux dans leur milieu naturel. Elle dit qu’elle peut montrer le logis de Madame Piquedru la lingère : il s’agit d’un terrier qu’elle a vu lors d’une promenade.
Peter Rabbit (Pierre Lapin), dont le modèle est le lapin de compagnie de la jeune Béatrix, est certainement le plus connu de ses personnages.
L’histoire fut écrite à l’origine pour le plus jeune fils de son ancienne gouvernante en 1893 sous la forme d’une lettre enrichie de dessins. Miss Potter décida plus tard de le publier mais elle dut le faire à compte d’auteur car aucun éditeur ne voulait prendre ce risque.
Les dessins ne furent colorés qu’en 1902 dans une nouvelle édition, tirées à 250 exemplaires. Le succès fut immédiat: Conan Doyle, entre autres, en acheta pour ses enfants.
Jeremy Fisher (Jéremie Pêche-à-la-ligne) lui a été inspiré par un ami de la famille. On ne sait pas s’il s’est reconnu.
Commerce
Le musée a été prévu par Béatrix Potter. Il est situé dans une de ses maisons: « Hill Top Cottage », à Sawrey (Cumbria), dans la région du lac Windermere.
Comme sa peinture, cette bâtisse apparaît comme une partie importante de sa vie mais qui n’est que la façade qu’elle veut bien montrer: elle y a peu vécu. On y retrouve cependant l’esprit de la campagne qu’elle affectionne mais on ressent aussi un peu de l’atmosphère de la bourgeoisie londonienne avec le goût des beaux objets.
De petites scènes replacent ses personnages dans leur décor. Les produits dérivés sont innombrables: peluches, tasses, posters, mobilier d‘enfants… Une aquarelle originale de Pierre Lapin s’est vendue à plus de 16000€.
Pour aller plus loin
Beatrix Potter’s tales
Un passage très intéressant sur la vie de Beatrix Potter dans «Demeures de l’esprit» par Renaud Camus – Fayard ainsi que plusieurs vues d’une de ses demeures.
La visite du musée dans le Lake District en Angleterre
Le roman «Miss Charity» de Marie-Aude Murail
Le film de Chris Noonan «Miss Potter» – 2006
The Tale of Jemima Puddle Duck and other farmyard tales by Beatrix Potter – éditions F. Warne and Co
Les dures conséquences de la création de la première femme
boîte de Pandore
La mythologie grecque propose ses explications des différents aspects de la condition humaine. Parmi les contraintes que subissent les humains et les questions qu’ils se posent, le mythe de Pandore apporte une réponse plus complexe qu’il n’y paraît de prime abord.
Un peu de généalogie
Prométhée et Epiméthée sont deux frères, fils du titan Japet et frères d’Atlas. Ils font donc partie des anciens fondateurs. Pour mémoire, au commencement était Chaos d’où furent issues trois sœurs: Erèbe (l’obscurité), Gaia (la terre) et Nyx (la nuit). Erèbe et Nyx eurent une nombreuse progéniture (dont Hypnos, le sommeil) et Gaia enfanta Ouranos (le ciel) dont elle eut ensuite une importante descendance dont les douze titans, l’inceste n’étant qu’un détail.
L’importance des prénoms
C’était alors l’âge d’or, période faste qui apparaît dans toutes les mythologies. Les noms des deux frères Prométhée et Epiméthée donnent déjà un avant-goût de la décadence qui va suivre: Ce sera l’âge d’argent. En effet Prométhée signifie celui qui voit devant lui, qui anticipe en quelque sorte mais son malheureux frère Épiméthée a un nom qui signifie juste le contraire et sera celui qui s’aperçoit trop tard des conséquences de ses actes.
Une lourde charge
Zeus demande aux deux frères de s’occuper des hommes et de leur permettre d’améliorer leur vie. Ils travaillent à accroître leurs capacités intellectuelles, leurs connaissances, leurs découvertes. Ils s’attachent tellement à leur œuvre et à leurs protégés qu’ils vont un peu trop loin. Prométhée fait en sorte que seules les parties inutilisables des animaux soient offertes en sacrifice, entraînant la colère de Zeus.
Le roi des dieux cache le feu en représailles et, deuxième vengeance plus subtile, présente Pandore, la première femme, à Epiméthée. Celui-ci, toujours aussi peu sage, l’épouse. Chacun pensera ce qu’il veut du mariage mais dans la mythologie grecque, c’est souvent le début des problèmes.
On remarquera aussi que dans quelque culture que ce soit, la femme et surtout la première, n’est pas vraiment un cadeau. Mais le début de la vie ne coïncide-t-il pas forcément avec le début des soucis: c’en est fini de la vie végétative, « ecce homo », voici l’homme! Que ce début soit celui de la vie, donné par la mère, qui restera la première femme pour son enfant ou celui de la première expérience amoureuse qui fait quitter l’enfance.
Les origines de la première femme
Pandore fut le résultat d’un travail d’équipe et quelle équipe! Tous les dieux aidèrent Hephaïstos, le divin forgeron, et Athéna, la déesse de la sagesse. Chacun fit don d’une qualité à la nouvelle créature: qui n’a pas rêvé d’avoir de tels parrains auprès de son berceau! Mais chacun sait que nous avons tous les défauts de nos qualités: le don de persuasion, par exemple, peut être dangereux si l’on en use sans discernement ou sans morale. De plus, Hermès, mal inspiré ce jour-là, introduisit dans son cœur le mensonge et la trahison.
Bien sûr, Epiméthée n’écoute pas les conseils de son frère. Prométhée, le clairvoyant, avait fortement conseillé à son frère de ne recevoir aucun cadeau de Zeus mais comment refuser une telle créature! C’est là aussi qu’apparaît la célèbre boîte de Pandore, récipient bien clos laissé à la garde d’Epiméthée et qui contenait tous les maux actuels de l’humanité. Mais on connaît la curiosité féminine! Et comment Epiméthée aurait-il pu rester insensible à sa femme qui avait de surcroît reçut le don de persuasion!
L’ouverture de la célèbre boîte
Celle-ci prend donc possession de la boîte et se hâte de l’ouvrir bien sûr puisque c’est défendu. Tous les maux de la terre en sortent et accablent désormais l’humanité. Misère, maladies, famines, dévastations s’abattent sur le pauvre peuple. Horrifiée, Pandore tente de refermer au plus vite le couvercle mais il est trop tard et il ne reste plus au fond de la boîte que le faible Espoir.
Une responsabilité partagée
Zeus, Hermès, Prométhée et Epiméthée ont chacun à leur manière contribué à l’arrivée des maux sur terre, parfois volontairement et de manière bien machiavélique. Pandore n’a été que l’outil déclencheur. Elle porte un peu moins de responsabilité qu’Eve mais en même temps on lui pardonne moins. Ève a souhaité goûter à l’arbre de la connaissance, on ne peut pas vraiment lui reprocher de vouloir s’instruire, fut-ce sur des sujets un peu scabreux symbolisés par le serpent et la pomme.
Réflexion
Que penser ? Comment considérer l’Espoir ? L’ultime consolation face à toutes les calamités ? Ou peut-être le pire des maux, la plus affreuse des tortures psychologiques ? C’est l’avis du philosophe Nietzsche qui écrit:
L’espoir est le pire des maux car il prolonge la souffrance de l’homme.
Voilà un récit d’amour et d’aventure avec des preux chevaliers du temps jadis, Siegfried, Les chevaliers de Burgundie et les châteaux forts du Niederland
Les légendes font partie d’un patrimoine imaginaire qui n’en finit pas de se renouveler et de vivre à travers de nouvelles variantes. C’est ainsi qu’on retrouvera Harry Potter ou plutôt on verra que son auteure JK Rowling se souvient des contes de son enfance. L’anneau du Nibelung, objet maléfique qui rend mauvais ceux qui le possèdent est repris dans la trilogie «Le Seigneur des Anneaux». Enfin, Siegfried est sur un point un avatar du héros grec Achille.
Finalement, les hommes partagent les mêmes rêves d’enfant par delà les siècles et les contrées: être invincible, découvrir un trésor, être invulnérable, pouvoir devenir invisible…et bien sûr conquérir l’amour d’une princesse .
Au Moyen-Age, la légende des Nibelungen (Nibelungenlied) était chantée par les ménestrels sous la forme d’un long poème épique. On trouve une version christianisée à partir du XIIIème siècle.
Au début est un âge d’or. Les hommes sont valeureux et les royaumes florissants et en paix. Mais les gens heureux n’ont pas d’histoire…
Kriemhild est une princesse d’une grande beauté dont la renommée de bonté, de piété et de charité envers les pauvres traverse la mer et la Forêt Noire. Elle est la fille de Dame Uté et du défunt roi Dankrat, qui est entré au Walhalla, le paradis des guerriers. Naïve, elle se laisse facilement tromper et sa douceur laissera place à des sentiments autrement violents pour défendre et venger son époux Siegfried. Elle n’aura aucune compassion , même pour sa propre famille. Elle épousera en secondes noces Attila (Etzel), le roi des Huns.
Sa mère Uté sait interpréter les songes ( il est question d’un faucon mis en pièce par deux aigles) et voit de grands malheurs s’abattre sur sa fille. La mère de Siegfried, Sieglind, connaît elle aussi les présages et voit le danger dans le vol des grues. Mais peut-être est-ce le cas de toutes les mères qui craignent pour leur enfant et cherchent à interpréter les signes!
Comme dans la plupart des contes, le héros Siegfried dit « le tueur de dragons » rencontre tour à tour des adversaires et des aides, des épreuves et des objets magiques.
L’épée Balmung appartient au trésor des Nibelungen qui est caché dans une caverne et gardé par des nains et par un dragon. Leur roi possède un bonnet magique qui rend invisible tout en donnant la force de dix hommes : la Tarn-Kappe, qui n’est pas sans rappeler la cape d’invisibilité de Harry Potter. Le célèbre sorcier a aussi son trésor gardé par des nains dans les profondeurs de la terre.
Après des batailles éprouvantes, Siegfried devient propriétaire de l’épée Balmung. Il ne lui reste qu’à se plonger dans le sang du dragon qu’il a tué car ce sang rend invulnérable. Mais comme Achille, il aura son point faible : une feuille tombe d’un arbre et se pose sur son épaule, empêchant le sang magique de faire son œuvre à cet endroit.
Le roi des nains le met en garde car une malédiction s’attache à tous les propriétaires du trésor mais notre intrépide héros n‘en a cure.
Le sombre Hagen est réputé pour son intelligence. Il est décrit ainsi: de longs cheveux noirs avec quelques fils d’argent (car il n’est plus tout jeune) lui tombent sur les épaules. Il ne sourit jamais et personne n’ose le regarder dans les yeux car il est très intimidant. On dit que le père de Hagen était un sylphe, sorte d’elfe en rapport étroit avec l’air, et qu’il lui doit son teint sombre et le don de lire l’avenir dans les vols des oiseaux. On voit que les oiseaux sont directement liés aux prédictions dans la mythologie nordique.
Hagen tuera Siegfried par traîtrise, volera le trésor des Nibelungen et le cachera dans le Rhin. Il y est peut-être encore !
La reine Brunehild est la reine D’Islande et une des Walkyries, vierges guerrières au service du dieu Odin. Elle est d’une grande beauté mais pour l’épouser, il faut d’abord la vaincre au combat. De nombreuses têtes d’hommes morts lors de cette épreuve ornent, si l’on peut dire, l’entrée de son palais. En effet, elle tire sa force de sa ceinture, autre objet magique. Orgueilleuse et jalouse, son amour pour le beau Siegfried s’est mué en haine féroce car Siegfried a épousé la douce Kriemhild.
La mythologie nordique a inspiré nombre d’auteurs, d’artistes et de réalisateurs. Citons par exemple
« Siegfried et le crépuscule des dieux « dans « L’anneau du Nibelung« , cycle de quatre opéras de Richard Wagner
« Siegfried et le Limousin » – pièce de théâtre de Jean Giraudoux créée en 1928
Pour les collectionneurs
Un très bel ouvrage pour enfants doré sur tranche et illustré par Papé
Pan est un dieu protecteur des troupeaux mais il est surtout connu pour son activité sexuelle inépuisable. Les auteurs littéraires ou les peintres licencieux se sont emparés avec joie d’un tel personnage. On peut citer entre autres le poème de Mallarmé: «l’après-midi d’un faune», illustré par Manet, mis en musique par Debussy et dansé sur une chorégraphie de Nijinski.
Il est souvent représenté avec un bâton de berger ou une petite branche de pin à la main ou encore avec sa flûte éponyme. La paysage est bucolique et on note la présence fréquente d’une source.
Il a le haut du corps plutôt humain et la moitié inférieure d’un bouc, couverte de poils avec des sabots fendus .Son visage est également empreint d’une certaine bestialité avec deux cornes de bouc, une barbe négligée et des yeux obliques.
Très rapide à la course, c’est aussi un excellent grimpeur. Il est parfaitement à l’aise dans la nature, escaladant les rochers ou se confondant avec la végétation.
Tout cela lui est fort utile car il passe son temps à guetter les Nymphes près des sources, tapi dans les buissons. Il aime bien faire la sieste aussi et il vaut mieux ne pas le déranger à ces moments-là. Il ne dédaigne pas non plus les jeunes garçons ni, lorsqu’il n’a trouvé personne pour s’accoupler, de se satisfaire tout seul.
Pan serait le fils d’Hermès et d’une mortelle. Une légende décrit même cette femme comme la célèbre Pénélope d’Ulysse mais il est préférable de laisser Pénélope à sa vertueuse attente.
On peut imaginer l’horreur de sa mère lorsqu’elle le découvrit à sa naissance. Heureusement, Hermès se chargea de l’enfant et l’emmena sur l’Olympe où il fit sensation. Dionysos, le dieu de la vigne et du vin, se mit à rire et on voit souvent Pan dans son cortège, avec Silène et les Satyres auquel il ressemble beaucoup. Il y joue de sa célèbre flûte.
Egalement appelée Syrinx, c’est un instrument à vent très répandu dans le monde. Des roseaux ou tubes creux de différentes tailles sont assemblés, bouchés à une extrémité et produisent des sons harmonieux et bien typiques. Les mélodies ou musiques d’accompagnement tirées de cet instrument sont particulièrement présentes dans le folfkore sud-américain. On a trouvé une flûte de Pan vieille de 2000 ans avant Jésus Christ (période néolithique en Ukraine) et un festival rassemblant amateurs et joueurs de flûte de Pan a lieu chaque année en Suisse.
Syrinx serait une nymphe, pourchassée comme il se doit par notre joyeux drille et qui se changea en roseaux pour lui échapper. Pan invente alors sa flûte qui lui rappelle son amour. D’autres légendes proposent d’autres inventeurs de la flûte: Hermès, Silène…
Plusieurs légendes tentent de donner une explication mythologique à l’écho. Dans l’une d’elles, Pan serait amoureux de la nymphe Echo, à la voix si agréable qu‘elle rendait amoureux les hommes qui l‘entendaient. Amour non payé de retour, bien sûr. Pan aurait alors «émietté» Echo sur toute la terre. De cette union naquit tout de même une fille, Lynx, qui fut par la suite changée en un petit oiseau, la bergeronnette, par Héra.
Pan est un préfixe signifiant l’ensemble, le tout. Ainsi panaméricain signifie en relation avec toute l’Amérique. On retrouve souvent ce préfixe comme dans panoplie ou panorama ou encore dans pancréas (creas: chair). Ambroise Paré disait qu’on nommait ainsi cet organe parce qu’il «a partout similitude de chair».
Comme l’étymologie le confirme, Pan, sa musique et sa gaieté prédisposant à la fête des corps et des cœurs, est présent un peu partout sur terre.
Éventuellement, si vous manquez de temps, un produit pour prise rapide à base de pectine de fruits sera parfait. La cuisson sera alors de 7 minutes.
Matériel
I grand récipient à fond épais
Une écumoire
I cuillère en bois à long manche
Des pots préalablement ébouillantés et bien séchés
I entonnoir plastique dont la pointe est coupée (on en trouve dans le commerce, sinon, il suffit de le fabriquer soi-même)
comptez 1,2 kg de fruits épépinés, pelés et passés au mixer pour 1 kg de sucre.
Prélevez les zestes des fruits non traités ( nombreux mais fins) et placez-les quelques minutes dans l’eau bouillante pour les amollir. Il est possible aussi ensuite de les faire dorer dans du beurre et de mettre le tout dans la confiture en fin de cuisson. Le beurre évite la formation d’écume.
Cuisson
Dans le grand récipient, mélangez les fruits mixés, les zestes et le sucre.
Chauffez à feu moyen sans cesser de remuer.
Lors de cette première phase, enlevez les pépins résiduels qui remontent à la surface et écumez.
Placez l’écume dans un bol, elle fera le bonheur des enfants mais devra être consommée rapidement (dans la semaine avec conservation au réfrigérateur). Cette écume porte différents noms selon les patois locaux: «creuchi» en Bresse par exemple.
Lorsque l’évaporation est moins dense, que les bouillons sont plus serrés, observez la goutte qui se forme à la pointe de la grosse cuillère en bois avec laquelle vous remuez, lorsque vous la relevez. Si cette goutte devient moins fluide, la confiture ou marmelade est prête.
Mettez en pots et fermez immédiatement. Placez le pot quelques minutes à l’envers pour assurer la stérilisation du couvercle.
La métamorphose d’Arachné, racontée avec humour.
Vous ne regarderez plus les araignées de la même façon maintenant.
dentelle arachnéenne
Arachné (cf le livre VI des Métamorphoses d’Ovide) est une jeune fille d’un milieu populaire. Sa renommée provient uniquement de son excellence dans l’art du tissage. Elle ne doit rien à personne, n’a ni rang social élevé ni protecteur et self-made woman en quelque sorte, présente le défaut de caractère assez compréhensible d’être consciente de sa valeur et assez peu modeste sur le sujet.
Chacun de nous a certainement dans son entourage une jeune fille qui ne supporte pas les conseils et s’ irrite facilement…
Bref, on vient de très loin admirer son travail et le bruit court que pour atteindre un tel niveau d’excellence, il faut bien qu’elle ait bénéficié d’un professeur divin: Pallas Athéna en l’occurrence. Arachné nie farouchement et déclare même qu’elle peut le prouver en concourant contre sa divine rivale et qu’on peut parier ce qu’on voudra qu’elle l’ emportera.
Fichtre! Parier n’importe quel enjeu qu’on va gagner contre un puissant est pour le moins hasardeux et la suite le prouvera, donnant par là une leçon de politique ni que Perrault ni La Bruyère n’auraient désapprouvée.
Le concours a donc lieu : chacune s’installe, mêle les fils et les coloris et fait se mouvoir agilement la navette sans ressentir de fatigue.
Athéna représente des actions fondatrices. On la voit faisant surgir l’olivier en frappant le sol de sa lance. Quelques exemples destinés plus particulièrement à sa rivale montrent la triste destinée de quelques mortels ayant manqué de respect aux dieux ou même simplement leur ayant déplu et qui devinrent montagnes ou oiseaux en représailles.
Arachné choisit de montrer des hommes et des femmes victimes d’abus de pouvoir des dieux en quelque sorte: tromperies ou viols sont habilement mis en scènes et encadrés. Le travail est superbe et dépasse sans conteste celui de la déesse. De dépit et de colère, celle-ci frappe Arachné qui, trop fière pour supporter l’affront, se pend.
Athéna décide alors de sauver la jeune fille et allège son poids en la réduisant à la taille d’une araignée, toujours pendue au bout d’un fil. Ses descendantes tissent des toiles que la science, notre dieu actuel, ne parvient toujours pas à égaler.
Qui n’a pas admiré un matin d’automne une superbe et fugitive parure de dentelle ornée des diamants de la rosée, dernière création d’Arachné?